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Olivier Savariau

De WikiNiort
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"Doucement, sois patient" chante Olivier Savariau dans Encore et encore, l’un des titres de l’album « Ginkgo », un principe qui peut aussi s’appliquer à lui-même. Près de trente-cinq ans d’apprentissage et d’expériences avant que ne s’impose enfin une veine riche d’arômes qui invitent au voyage, à se laisser mener aux portes de l’Afrique et de l’Orient. La musique d’Olivier est intense. Elle exprime une volonté d’offrir à l’auditeur ce qu’il a de meilleur, elle lui propose une rencontre. Son écoute est exigeante comme son créateur l’est vis-à-vis de lui-même. Une fois la complicité établie, se révèle une oeuvre à la hauteur de l’ambition. Bien loin des musiques cartes postales, Savariau respecte celui qui veut l’écouter. Si Olivier a choisi comme symbole le ginkgo biloba, cet arbre qui a résisté au souffle des bombes atomiques larguées sur le Japon, c’est peut-être parce qu’il lui ressemble un peu, lui qui s’est lentement construit et nourri, sans se déraciner. Car le chemin vers sa musique de fusion est un peu inhabituel.

Né en juin 1966 à Fontenay-le-Comte, en Vendée, il y passe toute sa jeunesse. Sa première guitare est espagnole, ramenée de vacances par ses parents alors qu’il a juste neuf ans. Il s’y essaye tout de suite sur Emmène-moi, une chanson de Graeme Allwright qui, coïncidence ?, deviendra plus tard un ami. Débuts en groupe au collège au côté de Serge Lavalette qui accompagne aujourd’hui Cheb Mami. Il joue du rock, comme aussitôt après avec les Sfilz, « son » groupe. Il traîne souvent au Snack, un club de jazz où il croise parfois Patricia Ouvrard et Jean-Marc Antolin qui lui prodiguent cours et conseils. Au point qu’à quinze ans, il préfère au lycée l’orchestre de bal de monsieur Guitton. Là, c’est du sérieux. Il prend des cours de guitare classique, mais surtout, il s’inscrit au Jazz Center de Nantes, dans le cours de Bob Dickson, et monte régulièrement à Paris se frotter à d’autres professeurs. Il en est ainsi pendant quinze ans encore, conjuguant l’apprentissage de l’harmonie, l’écriture de pièces de musique pour tous types d’orchestres et les bals pour payer les cours. Avec en point d’orgue un cycle de trois ans au département Jazz du Conservatoire National Supérieur de Paris, à la Cité de la Villette, sous la direction du réputé François Jeanneau. Mais qu’est-ce qu’un fan de jazz depuis ses douze ans, allait rechercher dans les temples du savoir ? « Je ne suis pas noir. Je n’ai pas de problèmes sociaux. Je n’osais pas revendiquer le jazz. J’ai ensuite eu le même sentiment au regard des musiques africaines. J’étais une éponge, un récepteur ». Jusqu’au jour où le récepteur déborde !

Olivier place bien quelques compositions dans les formations auxquelles il participe dans les années 70. Suzy et les Chics Types est un quartet de reprises de standards du jazz monté par la chanteuse Françoise « Suzy » Bobin (en rupture du Gang, l’efficace big band de rythm’n blues). Avec l’appui de la section rythmique des frères Chopin, ils se produisent pendant près de quatre ans, de 92 à 96, dans les bars et restaurants niortais et le guitariste y teste certains titres. Derrière ChariVari, le duo des chanteuses Linda-Carina Dyrefelt et Marie-Caroline Revranche (la future Lousse), il aborde une musique plus complexe, qui mélange les géographies et les époques. Sa participation au disque qu’elles enregistrent en 98 agit sur lui comme un déclic. Il y tient une place importante et reçoit carte blanche sur un titre, Olivieràbercy, Avec Marie-Caroline, une de ses anciennes élèves, c’est le début d’une relation amicale et musicale fiable. Mais cette seconde moitié des années 90 le voit surtout faire quelques rencontres capitales pour lui. Celle d’un musicien d’abord : le violoniste Johan Renard, au Conservatoire National à Paris. Après une première expérience scénique en 95, les deux hommes ne se quitteront plus. De tous les concerts, de tous les disques, ils sont des prolongements l’un de l’autre. Dix ans après, ils construisent encore de nouveaux projets ensemble, comme ce « Welcome to the computer » produit pendant le festival du Marais Poitevin. Celle d’un instrument ensuite. C’est un jeune moine sénégalais en vacances qui lui fait découvrir la kora, cet instrument au son cristalin popularisé auprès du grand public par le Yéké yéké de Mory Kanté. Mais, la tête dans les symphonies et la musique indienne, Olivier n’a pas vu fleurir le mouvement world. La kora prend soudain une place primordiale dans sa démarche (… Et dans son salon, au milieu des guitares, bouzoukis, banjo-sithar…). Celle enfin du peintre Slimane Ould Mohand, en 97. Leurs goûts pour les mélanges de couleurs, de sons, de matériaux se répondent. Leur inventivité respective les amène à se répondre également sur scène : l’un peint pendant que les autres jouent, et réciproquement.

Le résultat de ces années de formations, d’expériences et de rencontres prend en 2001 la forme d’un superbe CD au nom si bien choisi : « Caravansérail » est un lieu de passage, un hôtel ouvert au voyageur aventurier et aux amis. Nombreux ici ; autour d’Olivier et de Johan, on retrouve les anciens compagnons de ChariVari augmentés de quelques nouvelles têtes (Olivier Batlle à la basse, Abderahim Fathi aux percussions, Thomas Savy à la clarinette, Isabelle Saint-Yves au violoncelle…). Le résultat est un album chamaré, gorgé de matière et de couleurs, comme le sont la pochette et le livret illustrés par Slimane. Plus catalogue que mixage, le disque propose du jazz fusion enlevé (Vaï, Le Derviche), des douceurs aux tonalités africaines (Cougou), des mélodies aux influences andalouses (La Fuite, Alpha Tango) et les superbes lignes chantournées de Réflexion. Produit par l’association Oarsis qui marie à l’habitude arts plastiques et action humanitaire, le disque ne bénéficie malheureusement que d’une distribution assez confidentielle. « Cougou » qui sort l’année suivante (mais a été enregistré en public en juillet 2000 dans l’église abbatiale de Nieul-sur-l’Autize) connaît les mêmes difficultés. Entièrement joué à la kora, avec la participation des seuls Johan Renard et Yann Gilet, il révèle un côté plus serein et plus épuré de la musique d’Olivier, laissant la place à l’improvisation et à l’écoute entre les musiciens. Quand il parle de musique, le calme Olivier se lève, bouge, se transforme… Il évoque la nécessité de diffuser, de transmettre, d’où peut-être son engagement d’un temps dans la direction de l’orchestre Jazz à New Parth créé en 87 par Guy Marolleau et aujourd’hui piloté par Jean-Yves Monjauze. Olivier a toujours enseigné (« En 5ème, je me faisais payer en tabac ! »), au point de publier sa propre méthode de guitare.

Avec l’album « Ginkgo » sorti en 2004, Olivier Savariau développe tous ses parfums et toute sa puissance. A l’image de la pochette un peu étrange qu’il faut déplier pour découvrir toute la beauté du portrait réalisé par Jean-Louis Deborde, le disque ne se laisse pénétrer qu’après quelques écoutes. Pour révéler les pépites que sont Eruption nuptiale, lent blues instrumental aux sonorités décalées, Incantation qui mêle effusions de cordes et paroxysme de guitare électrique saturée, L’andalouse et ses frises virevoltantes de mandoline, Théa aux mélodies ouvragées et entremêlées de l’oud et de la kora magnifiés par le chant étrange et fragile de la Revranche, et par-dessus tout l’envoûtante berceuse africaine d’Encore et encore. « Ginkgo » est le résultat de plus de deux ans de travail sur les musiques maghrébines. Il doit aussi beaucoup à une nouvelle complicité développée avec le multi-instrumentiste Fayçal El Mezouar qui joue dans tous les morceaux. Cet album hors des modes et du temps résistera aux années, comme peuvent le faire ceux de l’Angevin Titi Robin, construisant sa propre culture à force de mélanger les couleurs. Jouant régulièrement à Niort, Olivier Savariau est directeur de l’école de muisque de Chauray depuis la fin des années 2000.


Source

Extraits, avec l'autorisation de l'auteur, de l'ouvrage "Micro Faunes - 30 ans de création musicale en Deux-Sèvres" (Philippe Guillemoteau - Ed. Patrimoines et Médias, 2008)